Le Livraire

Carnet de lecture

Le Dieu des animaux – Aryn Kyle

Traduit de l’anglais par Anne-Laure Tissut
Gallimard
ISBN : 9782070782437
Titre original : The God of Animals

La particularité de ce roman, c’est avant tout une ambiance particulière : celle d’un ranch perdu dans le Colorado et dont les affaires sont loin d’être florissantes, à des lieux du mythe autour du monde du cheval, des cow-boys  et des ranch. Le quotidien d’Alice, treize ans, n’a rien de merveilleux ou de mirobolant : sa mère, atteinte d’un mal que sa fille nomme tristesse, garde le lit depuis sa naissance. De la sœur aînée, véritable prodige, on ne sait que peu de choses : elle s’est enfuie avec un cow-boy quelques mois auparavant. Tandis que son père s’acharne à faire marcher les affaires, Alice traîne sa solitude et ses questions.
Forcé de trouver de nouveaux moyens pour gagner de l’argent, le père transforme une partie du ranch en pension, ce qui amène une nouvelle clientèle composée de jeunes femmes riches et séduisantes, baptisées les Poissons-Chats.

S’inventant une amitié avec une de ses camarades de classe retrouvée morte, Alice noue une étrange relation avec un de ses professeurs, seul adulte avec qui elle peut véritablement parler, et par là même, poser ces questions qui la perturbent tant, tenter de comprendre un monde au sein duquel elle a du mal à trouver sa place. Elle n’est pas la cavalière émérite qu’était sa sœur, solitaire au collège, elle n’a pas de véritable amie, pas même Sheila, seule et unique élève de son père.
Ce n’est pas tant la voix d’Alice qui rend singulière la narration du [Le] dieu des animaux, mais davantage l’équilibre fragile entre l’homme et la Nature. Cette dernière étant omniprésente, quasiment un personnage à part entière, représentée à la fois par l’environnement immédiat -le désert-, par la météo capricieuse et extrême, par les éléments déchainés -la rivière dans laquelle se noie Polly Cain, les inondations- , par la présence de la maladie, de la mort. Enfin et surtout, cette nature se manifeste par le biais des chevaux qui constituent le centre névralgique du récit. La vie et l’action du roman tournent toutes entières autour des chevaux, que ce soit dans le récit du quotidien (les soins, les shows, le dressage…), en toile de fond de l’histoire familiale. Je ne suis pas et je n’ai jamais été une amoureuse des chevaux et le monde hippique me laisse relativement froide ; pourtant, les descriptions des dressages, des compétitions, de tout cet univers s’intègrent brillamment au récit, nous emportant à des milliers de kilomètres et on se surprend à guetter en compagnie d’Alice quelque chose de nouveau qui viendrait arranger la situation, à se demander dans quelle direction aller.
Il n’y a pas de fin fracassante, mais un achèvement réaliste et humain, une page qui se tourne, sans miracle mais sans pathos, sans éclat mais avec cet effet de surprise que la vie nous réserve parfois.

Ce livre a été lu et chroniqué dans le cadre de l’opération Masse Critique organisée par Babelio.

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